ARTICLE

Prescription durable – 2 / Gestion responsable en clinique pour animaux de compagnie

Ecrit par Ian Ramsey, Rosemary Perkins et Fergus Allerton

 

Tous les cliniciens sont désormais conscients de la nécessité de bien gérer les prescriptions médicamenteuses ; cet article donne quelques conseils pour le faire au mieux.

Vétérinaire travaillant devant son ordinateur
© Shutterstock

Points clés

Group 15 1

Respecter scrupuleusement l’approche « One Health » est essentiel pour préserver l’efficacité des antibactériens.

Group 15 2

Se référer à l’acronyme « PROTECT ME » permet de se rappeler les principes de la prescription raisonnable des antibactériens.

Group 15 3

Les antibiotiques sont souvent prescrits pour des affections non-bactériennes ; ils sont alors inefficaces et peuvent même retarder la mise en œuvre du traitement approprié.

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Des tests peuvent aider à réduire l’administration inutile des antiparasitaires, à évaluer les niveaux de risque locaux et individuels, et à détecter une éventuelle résistance aux antiparasitaires.

Introduction

Dans ce deuxième article d’une série de trois, nous examinerons comment la prescription de médicaments vétérinaires dans une clinique pour animaux de compagnie peut être améliorée, en vue de limiter les risques de résistance et de pollution de l’environnement. Les débats pêchent souvent par manque de données objectives, mais certaines précautions raisonnables peuvent être prises même si les preuves manquent. Le dernier article listera notamment les éléments qu’il pourrait être nécessaire de rassembler à l’avenir, afin de préserver l’efficacité des médicaments tout en protégeant l’environnement. 

Cet article examine trois groupes de médicaments : les antibactériens, les antiparasitaires et les agents de chimiothérapie. Bien que les fongicides et les agents antiviraux soient également considérés comme des antimicrobiens (et qu’une grande partie des principes actuels pour une prescription antibactérienne responsable puisse probablement s’appliquer à d’autres catégories d’antimicrobiens), les éléments de preuves sont beaucoup moins nombreux pour ces dernières catégories (1). 

Recommandations pour une utilisation responsable des antibactériens

Dans le cadre de l’approche One Health, une approche coordonnée et une prescription rigoureuse des antibactériens sont essentielles pour préserver l’efficacité des antibactériens actuels pour les générations futures. De nombreuses initiatives indépendantes ont été développées pour favoriser les bonnes pratiques d’utilisation des antibactériens chez les animaux de compagnie ; parmi d’autres ressources nationales, citons par exemple les recommandations PROTECT ME de la British Small Animal Veterinary Association (BSAVA), le consensus danois sur l’utilisation des antibiotiques et le livre GRAM de CEVA (Encadré 1) (2).

 

ENCADRÉ 1. Catégories d’antibiotiques reconnues par l’Agence Européenne des Médicaments.

Catégorie A (à proscrire) : NE PAS UTILISER
Les antibiotiques d’importance critique les plus prioritaires pour la médecine humaine (tels que l’imipénem, le linézolide, teicoplanine, vancomycine) ne doivent pas être utilisés chez les animaux.
Catégorie B (à éviter) : les antibiotiques d’importance critique hautement prioritaires
L’usage des fluoroquinolones (enrofloxacine, marbofloxacine, pradofloxacine, ciprofloxacine) et des céphalosporines de 3e génération (céfovécine) doit être restreint afin de limiter les risques pour la santé publique. Un antibiogramme doit si possible être réalisé sur des prélèvements avant de commencer le traitement.
Catégorie C (attention)
Ils ne seront utilisés que si aucun antibiotique de la catégorie D n’est susceptible d’être cliniquement efficace.
Catégorie D (prudence) : antibiotiques de première intention 
L’administration d’antibiotiques de première intention doit être limitée aux cas où le besoin clinique est réel. Il faut éviter toute prescription inutile ainsi que les traitements longs.

 

L’International Society for Companion Animal Infectious Diseases (ISCAID) a élaboré d’autres recommandations à propos du traitement de certaines affections avec des antibactériens : infections des voies urinaires, maladies respiratoires et pyodermites (3-5). Plus récemment, des recommandations européennes ont été publiées à propos du traitement d’une diarrhée aiguë chez le chien (6) et des règles concernant la prophylaxie chirurgicale chez les animaux de compagnie (7). De nombreuses plateformes éducatives en ligne donnent accès à toutes ces recommandations et aident les cliniciens à les mettre en œuvre (8). L’ensemble de ces ressources véhicule des messages parfaitement cohérents, en particulier en ce qui concerne les « grandes victoires » : les situations cliniques couramment rencontrées qui peuvent être gérées efficacement et en toute sécurité sans antibiotiques.

Bien connaître les lignes directrices relatives à l’utilisation des antibactériens va de pair avec la tendance de plus en plus nette à ne pas administrer d’antibactériens pour traiter des affections qui s’améliorent généralement sans (comme les affections du bas appareil urinaire chez le chat, les vomissements et les diarrhées aigus, et les infections des voies respiratoires supérieures) (9). Les consensus théoriques sur l’utilisation des antimicrobiens sont de mieux en mieux connus, mais il faut maintenant que le plus grand nombre de vétérinaires possible accepte de les mettre en pratique. En 2016/2017, la durée médiane du traitement antibactérien d’une cystite sporadique chez le chien était de 14 jours : elle est passée à 10 jours en 2018, ce qui laisse penser que les recommandations de l’ISCAID ont bien diffusées (10).

Les habitudes des prescripteurs ne peuvent évoluer que si les recommandations sont communiquées efficacement au public concerné. L’utilisation de nouvelles technologies (l’application First Line de l’Ontario Veterinary College (11) propose par exemple des conseils de prescription vétérinaire) ou la traduction des documents dans différentes langues permettent de les rendre plus accessibles (9). 

Avant d’entreprendre une chimiothérapie, les cliniciens doivent vérifier que leur environnement et leur personnel (à la fois le niveau et la formation) sont adaptés ; ils doivent aussi évaluer la capacité des propriétaires à respecter les protocoles d’élimination des déchets.

Ian Ramsey

Prescription rationnelle des antibactériens

De nombreuses ressources proposent d’excellents conseils mais, pour les besoins de cet article, les auteurs utiliseront l’acronyme PROTECT ME pour illustrer les principes de base d’une bonne prescription d’antibactériens (Figure 1, Encadré 2). Élaboré pour la première fois en 2012 et actualisé deux fois depuis, en 2019 et 2023, le poster PROTECT ME a été conçu pour servir de support aux échanges lors des réunions professionnelles, afin que toutes les personnes concernées par les lignes directrices se sentent personnellement impliquées par leur mise en œuvre pratique. Cet acronyme est maintenant largement adopté par les praticiens vétérinaires (en particulier au Royaume-Uni) et il serait souhaitable que toutes les cliniques revoient leur utilisation des antibiotiques en se basant sur les principes identifiés.

 

Figure 1. L’acronyme PROTECT ME résume les principes à appliquer par les équipes vétérinaires et les propriétaires en vue de limiter les risques d’antibiorésistance. Leur respect est essentiel pour réduire la menace que représentent les souches de bactéries résistantes. 

  • Prescrire uniquement lorsque c’est nécessaire
  • Remplacer les antibiotiques par d’autres traitements
  • Optimiser les protocoles thérapeutiques
  • Traiter efficacement
  • Employer un médicament à spectre étroit
  • Conduire des examens cytologiques et bactériologiques
  • Tayloriser (= Adapter) les protocoles de la clinique
  • Monitorer (= Contrôler)
  • Enseigner aux autres
 

ENCADRÉ 2 – Assurer une bonne gestion des antibiotiques dans la pratique (d’après 12).

L’initiative PROTECT ME encourage les cliniques vétérinaires à revoir leur utilisation des antibiotiques et à élaborer des protocoles permettant de gérer rationnellement les cas cliniques*. Ils seront établis en fonction de la catégorie d’affection observée ; exemples :

  • otites infectieuses 
  • infections respiratoires 
  • infections buccales 
  • infections urinaires 
  • infections gastro-intestinales 
  • Infections oculaires 
  • infections orthopédiques
  • infections cutanées 
  • plaies et infections post- opératoires 
  • infections menaçant le pronostic vital 
  • utilisation chirurgicale 
  • divers.

Au sein de chaque catégorie, l’équipe doit ensuite identifier les cas où les antibiotiques sont inutiles. Les antibiotiques ne sont par exemple pas indiqués pour traiter les affections urinaires suivantes :

  • cystite idiopathique féline
  • urolithiase féline et urolithiase canine non due à des struvites
  • incontinence urinaire
  • bactériurie subclinique (canine ou féline), même chez les animaux présentant un hyperadrénocorticisme, un diabète sucré ou des lésions de la moelle épinière
  • vaginite juvénile canine.

Lors d’affection gastro-intestinale, les antibiotiques ne sont pas non plus indiqués dans les cas suivants :

  • vomissements aigus
  • diarrhée aiguë (même lors de diarrhée hémorragique aiguë), sauf en cas de septicémie
  • pancréatite
  • infections gastriques à Helicobacter
  • infections à Campylobacter, Salmonella, Clostridium perfringens ou C. difficile
  • diarrhée chronique.
Au sein de chaque catégorie, il sera alors possible de décider quand un antibiotique est approprié et quel antibiotique ou classe d’antibiotiques sera choisi. Il serait par exemple judicieux de traiter une infection bactérienne sporadique des voies urinaires pendant 3 à 5 jours avec de l’amoxicilline (± acide clavulanique) ou du triméthoprime/sulfamide ; en cas de prostatite chez un chien mâle entier, il est préférable de traiter pendant 2 à 4 semaines avec du triméthoprime/sulfamide ou une fluoroquinolone (enrofloxacine ou marbofloxacine), en effectuant une castration médicale ou chirurgicale en parallèle. Il est alors indispensable de consulter le classement des antibiotiques établi par l’Agence Européenne des Médicaments (Encadré 1).
L’équipe vétérinaire doit aussi savoir quand une culture est indispensable pour garantir l’efficacité du traitement (cystite récurrente par exemple) et quand la culture est fortement recommandée pour orienter le traitement (cystite sporadique par exemple). De même, il faut lister les indications où la cytologie sera utile pour orienter le traitement (arthrite septique par exemple). Enfin, dans certaines situations, il faudra impérativement consulter des ressources spécialisées avant de prescrire un médicament à un chat (lors d’infection féline par Chlamydophila felis par exemple).
 *Le document PROTECT ME est disponible en ligne ou sous forme de poster.

 

  • Prescrire des antibactériens seulement si c’est nécessaire. Chez les animaux de compagnie, des traitements antibactériens sont trop souvent prescrits lors d’affections non bactériennes (lors de diarrhée, de toux, d’écoulement nasaux et de cystite féline) alors qu’ils sont inutiles. Bon nombre de ces affections ont une origine virale, toxique ou immunitaire, un traitement antibactérien est alors inefficace et peut même retarder la mise en œuvre du traitement approprié. Même en cas d’infection bactérienne secondaire, traiter la cause première peut éviter d’avoir à prescrire des antibactériens. En chirurgie, les antibactériens ne doivent pas remplacer une bonne asepsie, et ils sont inutiles pour les interventions « propres » (comme la stérilisation ou l’ablation de masses cutanées). Il est important de réfléchir à l’intérêt réel de l’administration systématique d’antibactériens en postopératoire ; cette pratique est aujourd’hui déconseillée même en cas de chirurgie orthopédique avec pose d’un implant.
  • Remplacer par des traitements non antibactériens. Les alternatives aux antibactériens devraient être prioritaires dans un grand nombre de cas (Figure 2). Un syndrome de diarrhée hémorragique aiguë peut par exemple souvent être géré sans antibactériens, grâce à la fluidothérapie intraveineuse, un nursing de qualité, des antiémétiques et des probiotiques. Les abcès dus à des morsures de chat seront traités uniquement par ponction, drainage et lavage. Des antitussifs et du repos peuvent suffire en cas de toux de chenil chez un chien.
  • Optimiser la posologie et les voies d’administration. Les antibiothérapies courtes sont souvent aussi efficaces que les traitements longs. La médecine humaine a abandonné les durées arbitraires et la médecine vétérinaire devrait faire de même. L’essai « Stop on Sunday » étudie les durées optimales de traitement de la cystite canine sporadique (13). Il est possible d’essayer de traiter moins longtemps en réévaluant l’animal avant la fin. Dans la mesure du possible, les traitements topiques seront privilégiés afin de limiter l’impact des antibactériens systémiques sur les microbiomes.
  • Traiter efficacement. Avant de prescrire, les cliniciens doivent toujours tenir compte des bactéries susceptibles d’être présentes dans chaque cas particulier. Il est également important de réfléchir aux antibactériens aptes à diffuser dans les tissus affectés. Ces informations n’étant pas toujours disponibles, les cliniciens peuvent s’appuyer sur des recommandations (telles que celles présentées dans le poster PROTECT ME) pour sélectionner des médicaments efficaces lors d’infections spécifiques. Lors de pyélonéphrite ou de prostatite, il est nécessaire d’utiliser des antibiotiques qui diffusent localement, comme les fluoroquinolones ou les sulfamides potentialisés. Une bonne administration est également essentielle et, grâce à des ressources telles que le site International Cat Care (14), les propriétaires peuvent apprendre à administrer correctement les médicaments par voie orale, afin de réduire le recours aux injections à longue durée d’action.
  • Employer des antibiotiques à spectre étroit. Les antibactériens à large spectre favorisent les résistances, tandis que les médicaments plus ciblés limitent les effets sur les bactéries commensales et préservent l’efficacité thérapeutique des médicaments. Des antibactériens à large spectre peuvent s’avérer nécessaires lorsqu’une infection grave nécessite un traitement immédiat, mais le traitement sera ensuite adapté selon les résultats de l’antibiogramme. Son coût se justifie car il permet un traitement ciblé avec des médicaments souvent moins chers, et qui réduit les risques de multirésistance.
  • Conduire un examen cytologique et bactériologique. La cytologie et la culture bactérienne sont essentielles pour optimiser l’antibiothérapie ; la cytologie confirmera rapidement l’infection bactérienne, tandis que la culture identifiera d’éventuelles résistances. Ces examens sont essentiels en cas de traitement prolongé, d’infection résistante ou si le pronostic vital est engagé. L’échec d’un traitement de première intention ne doit pas conduire à changer d’antibiotique sans attendre les résultats de l’antibiogramme. « Si vous ne réussissez pas du premier coup, essayez une approche différente plutôt qu’un médicament différent ».
  • Tayloriser (=Adapter) les protocoles de la clinique. Une prescription responsable s’appuie sur le respect collectif de protocoles d’antibiothérapie fondés sur des preuves. Le poster PROTECT ME aide à établir des protocoles de première intention incluant le choix des antibiotiques, les tests diagnostiques et les traitements alternatifs. Il est très important que la direction s’engage activement dans cette démarche : ainsi que cela a été reconnu en médecine humaine et vétérinaire, son implication encourage le respect des protocoles d’antibiothérapie en clinique (15,16).
  • Monitorer l’évolution et les résultats. Les infections au site opératoire seront surveillées et les protocoles adaptés si nécessaire. Il faut aussi contrôler le bon usage des antibactériens, en particulier ceux d’importance critique, comme les fluoroquinolones et la céfovécine.
  • Enseigner et collaborer. La pression exercée par les clients pour obtenir des antibiotiques est souvent liée à un manque d’information. Expliquer les alternatives et les risques réduit cette pression. Une prescription responsable implique aussi de sensibiliser les propriétaires aux règles d’hygiène et de prévention des maladies chez leurs animaux. Des outils tels que les « formulaires de non-prescription » peuvent renforcer la décision de ne pas prescrire d’antibiotiques ; cette stratégie a fait ses preuves en médecine humaine.
Exemples visuels d’affections qui peuvent être traitées en toute sécurité sans recourir aux antibiotiques
Figure 2. Exemples d’affections qui peuvent être traitées en toute sécurité sans antibiotiques : (a) Syndrome de diarrhée hémorragique aiguë chez un chien (sauf en cas de signes de septicémie) ; (b) colite aiguë ; (c) cystite idiopathique féline ; (d) abcès suite à une morsure chez un chat. © Ian Ramsey (a,b) / Shutterstock (c,d)

En respectant ces principes, il est possible d’éviter de prescrire des antibiotiques s’ils sont inutiles, améliorer les résultats thérapeutiques et limiter les risques d’antibiorésistances.

Prescription rationnelle d’antiparasitaires  

Les principes de la prescription responsable des antiparasitaires sont moins clairement définis que ceux visant à lutter contre les résistances aux antibiotiques. Elle repose davantage sur la connaissance du contexte local et la compréhension des risques. Depuis une trentaine d’années, un changement culturel s’est produit dans de nombreux pays : les antiparasitaires sont plus utilisés dans un contexte de prévention systématique que pour traiter des infestations confirmées. Cette évolution a été encouragée par le développement de traitements plus sûrs pour l’animal et plus faciles à administrer, ainsi que par la diffusion croissante de maladies telles que l’angiostrongylose chez les animaux de compagnie (17). 

Lorsqu’ils prescrivent des antiparasitaires, les cliniciens doivent tenir compte des dangers potentiels et adopter une approche au cas par cas. Une prophylaxie systématique peut être nécessaire dans certaines régions ou certains pays lorsqu’il existe un risque parasitaire avéré ; c’est par exemple le cas de l’infestation canine par Dirofilaria immitis, le « ver du cœur » (18), mais la situation est différente dans chaque pays. Et même lorsqu’une protection systématique est conseillée, il est important de choisir un traitement le plus ciblé possible et de l’administrer correctement. Il existe cependant de nombreuses zones d’ombre à propos des parasites et de l’usage des antiparasitaires, ce qui complique l’analyse du risque. Les auteurs conseillent aux vétérinaires et aux propriétaires de s’appuyer sur l’acronyme IMPACT (Tableau 1), qui résume les précautions à prendre avant d’utiliser des produits antiparasitaires.

 

Tableau1. Comment évaluer l’IMPACT des antiparasitaires avant utilisation.

  • Identifier les parasites auxquels un animal pourrait raisonnablement être exposé et évaluer le risque que cela entraînerait. Tenir compte de la saisonnalité de certains parasites.
  • Maintenir une surveillance régulière vis-à-vis des infestations potentielles, à la fois à la clinique (en faisant par exemple des coproscopies pour identifier les parasites internes) et à domicile, en encourageant par exemple les propriétaires à utiliser régulièrement un peigne antipuce et à inspecter le chien après la promenade pour repérer des tiques. 
  • Prévenir certaines infestations parasitaires sans médicaments : en évitant par exemple les aliments crus, en lavant les textiles servant au couchage de l’animal chaque semaine à haute température, en passant régulièrement l’aspirateur dans les zones fréquentées par l’animal et en évitant les endroits connus pour être infestés de tiques. 
  • Arrêter d’utiliser des antiparasitaires à large spectre s’ils ne sont pas nécessaires. Peu d’animaux risquent d’être infestés à la fois par des ascaris, des ténias, des filaires, des tiques et des puces. 
  • Communiquer avec les clients et les collègues à propos des dangers (y compris pour l’environnement) liés à l’utilisation des antiparasitaires, et de l’importance du respect de la posologie et des consignes pour éliminer les contenants. Les propriétaires dépenseront aussi moins d’argent en évitant d’utiliser des pesticides dans leur l’environnement. 
  • Témoigner de ce qu’il faut faire et ne pas faire en matière d’antiparasitaires, exemples : ramasser et éliminer les déjections canines de manière appropriée ; ne pas utiliser de produits topiques chez les chiens qui se baignent, qui sont lavés ou suivent une hydrothérapie ; ne pas jeter dans les toilettes les déjections ou l’urine des animaux traités par voie orale.

 

Avant de prescrire les antiparasitaires, les vétérinaires doivent s’assurer du consentement éclairé de leur client et vérifier qu’ils respectent des recommandations fiables ou les protocoles décidés par la clinique. Au Royaume-Uni, les praticiens peuvent s’appuyer sur les conseils prodigués par la British Veterinary Association (BVA), la BSAVA et la British Veterinary Zoological Society (BVZS) à propos de l’utilisation responsable des antiparasitaires chez le chat et le chien (19). Leurs recommandations sont par exemple présentées dans un poster proposant un programme en 5 étapes (Figure 3). Dans les autres pays, il convient de consulter et de respecter les dispositions légales, les lignes directrices et les protocoles recommandés.

Rechercher la présence de parasites internes peut éviter de prescrire des anthelminthiques inutilement. Il faut également évaluer les risques particuliers encourus par l’animal et détecter une éventuelle résistance aux antiparasitaires. Il est toutefois important de savoir que les résultats des coproscopies peuvent varier en fonction de la technique de flottation utilisée et des parasites en cause (20). Les données collectées par différents laboratoires seront utiles pour évaluer la prévalence de certains parasites aux niveaux régional ou national, mais la situation locale peut être différente (21).

Les principes de la prescription responsable des antiparasitaires sont moins clairement définis que ceux visant à lutter contre les résistances aux antibiotiques car elle repose davantage sur le contexte local et sur l’analyse des risques.

Rosemary Perkins

Bien prescrire une chimiothérapie 

La mise en œuvre d’une chimiothérapie dans une clinique pour animaux de compagnie fait courir des risques aux professionnels, aux animaux et à la santé publique (22). Ces traitements sont pourtant maintenant pratiqués dans de nombreuses situations. Avec les nouveaux protocoles (comme la chimiothérapie métronomique), les clients peuvent administrer les médicaments à domicile et la clinique ne contrôle plus la situation. Même s’il ne s’agit pas de chimiothérapie conventionnelle, l’utilisation de nouveaux agents (tels que les inhibiteurs de c-kit à petites molécules) peut présenter des risques, en particulier pour les femmes enceintes ; ces produits doivent donc être considérés comme des médicaments cytotoxiques. Il est indispensable d’appliquer les règles suivantes :

  • Prescrire à bon escient : puisque l’exposition à la chimiothérapie fait courir des risques importants à l’animal et aux personnes qui manipulent ces médicaments, ils ne doivent être prescrits qu’en cas d’absolue nécessité. Il faut donc que la maladie soit confirmée histologiquement ou cytologiquement, et qu’il existe une bonne chance de réponse au traitement. L’utilisation expérimentale sera limitée à des essais cliniques contrôlés.
  • Limiter l’exposition professionnelle : le risque est lié à la manipulation des médicaments, au nettoyage des écoulements accidentels, et au contact avec les fluides corporels ou les déjections des animaux traités par chimiothérapie. L’exposition peut avoir lieu par contact direct avec la peau, par inhalation de particules médicamenteuses en suspension dans l’air, par ingestion ou par piqûre d’aiguille accidentelle. Le milieu dans lequel l’animal est traité et hébergé après la chimiothérapie risque d’être contaminé par les matières fécales, l’urine et les autres fluides corporels, si bien que les propriétaires et leur environnement sont tous exposés à un risque de contamination (23).
  • Vérifier l’adéquation de l’environnement : avant de se lancer dans une chimiothérapie, il faut que le niveau de formation du personnel soit suffisant et que la capacité du propriétaire à respecter les protocoles d’élimination des déchets soit jugée suffisante. Tous les clients doivent recevoir des informations écrites à propos des risques liés aux médicaments cytotoxiques (pour les humains, les animaux traités et l’environnement). Ces informations incluront le temps d’élimination du (des) médicament(s) administré(s) et la manière de traiter tout ce qui est excrété par l’animal (la salive, l’urine, les vomissements et les fèces).
  • Assumer le coût d’une chimiothérapie sûre : il est évident que certaines des mesures de précaution décrites ci-dessus augmentent le coût de la chimiothérapie et rendront malheureusement le traitement inabordable dans certains cas. Les cliniques ont cependant la responsabilité légale de protéger leurs salariés ainsi que leurs clients lorsqu’ils soignent les animaux. Il est donc inenvisageable de négliger les procédures de sécurité pour limiter les coûts. Plusieurs sources d’information sont recommandées pour en savoir plus à propos de la mise en œuvre des protocoles de chimiothérapie (24).

La pression exercée par les clients pour obtenir des antibiotiques est souvent liée à un manque d’information ; expliquer les alternatives et les risques réduit cette pression. Une prescription responsable implique aussi de sensibiliser les propriétaires aux règles d’hygiène et de prévention des maladies chez leurs animaux.

Fergus Allerton

Conclusion

Les vétérinaires sont inévitablement confrontés à des dilemmes lorsqu’ils prescrivent et utilisent des médicaments pour traiter les animaux. Ils doivent chercher à les soigner au mieux, tout en protégeant la santé humaine et environnementale. Les recommandations publiées sont toujours utiles, à condition qu’elles aient été édictées par des autorités indépendantes, qu’elles soient basées sur des preuves et acceptées par l’ensemble de la profession. Dans le prochain article, nous examinerons les facteurs qui doivent présider à l’élaboration de recommandations fiables, afin que les vétérinaires et les propriétaires puissent accéder aux meilleures pratiques.

 

Références

  1. https://www.woah.org/en/preserving-antimicrobials-as-lifesavers-for-humans-animals-plants-and-ecosystems/#:~:text=Antimicrobials%20are%20agents%20used%20to,may%20also%20have%20antimicrobial%20properties.
  2. Allerton F, Prior C, Bagcigil AF, et al. Overview and evaluation of existing guidelines for rational antimicrobial use in small-animal veterinary practice in Europe. Antibiotics (Basel). 2021;10(4);409.
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  4. Hillier A, Lloyd DH, Weese JS, et al. Guidelines for the diagnosis and antimicrobial therapy of canine superficial bacterial folliculitis (Antimicrobial Guidelines Working Group of the International Society for Companion Animal Infectious Diseases). Vet. Dermatol. 2014;25(3):163-e43.
  5. Lappin MR, Blondeau J, Boothe D, et al. Antimicrobial use guidelines for treatment of respiratory tract disease in dogs and cats: Antimicrobial Guidelines Working Group of the International Society for Companion Animal Infectious Diseases. J. Vet. Intern. Med. 2017;31(2):279-294.
  6. Jessen LR, Werner M, Singleton D, et al. European Network for Optimization of Veterinary Antimicrobial Therapy (ENOVAT) guidelines for antimicrobial use in canine acute diarrhea. Vet. J. 2024;307:106208.
  7. Sørensen TM, Scahill K, Ruperez JE, et al. Antimicrobial prophylaxis in companion animal surgery: A scoping review for European Network for Optimization of Antimicrobial Therapy (ENOVAT) guidelines. Vet. J. 2024;304:106101.
  8. Allerton F, Russell J. Antimicrobial stewardship in veterinary medicine: a review of online resources. JAC Antimicrob. Resist. 2023;5(3):dlad058.
  9. Farrell S, Bagcigil AF, Chaintoutis SC, et al. A multinational survey of companion animal veterinary clinicians: How can antimicrobial stewardship guidelines be optimised for the target stakeholder? Vet. J. 2024;303:106045.
  10. Weese JS, Webb J, Ballance D, et al. Evaluation of antimicrobial prescriptions in dogs with suspected bacterial urinary tract disease. J. Vet. Intern. Med. 2021;35(5):2277-2286.
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  16. Rees GM, Bard A, Reyher KK. Designing a national veterinary prescribing champion programme for Welsh veterinary practices: The Arwain Vet Cymru Project. Antibiotics (Basel). 2021;10(3);253.
  17. Morgan ER, Modry D, Paredes-Esquivel C, et al. Angiostrongylosis in animals and humans in Europe. Pathogens 2021;10(10);1236.
  18. Anvari D, Narouei E, Daryani A, et al. The global status of Dirofilaria immitis in dogs: a systematic review and meta-analysis based on published articles. Res. Vet. Sci. 2020;131:104-116.
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  24. https://www.bsavalibrary.com/content/book/10.22233/9781913859312 Accessed 26th March 2025.
Ian Ramsey

Ian Ramsey

BVSc, PhD, DSAM, Dip. ECVIM-CA, FHEA, FRCVS, Université de Glasgow, Hôpital pour animaux de compagnie, Glasgow, Royaume-Uni

Royaume-Uni

Le Dr Ramsey est professeur de médecine pour animaux de compagnie à l’école vétérinaire de l’Université de Glasgow. Il est diplômé de l’école vétérinaire de Liverpool, a obtenu un PhD à Glasgow et  a été résident à Cambridge. Il est spécialiste britannique (RCVS) et européen en médecine des petits animaux et a publié de nombreux articles sur le sujet. Sa contribution à la médecine des animaux de compagnie a été récompensée par le prix BSAVA Woodrow en 2015 et il est devenu membre du Royal College des vétérinaires praticiens en 2016. Ancien président de la BSAVA, il a siégé dans de nombreux organismes professionnels, dont la Responsible Use of Medicines Alliance pour les animaux de compagnie et les chevaux (RUMA-CAE), et participe à l’Antibiotic Amnesty depuis 2022.

Rosemary Perkins

Rosemary Perkins

BVSc, PGCertSAOpth, PhD, MRCVS, Faculté des sciences biologiques, Université du Sussex, Brighton, Royaume-Uni

Royaume-Uni

La Dre Perkins est vétérinaire praticienne pour animaux de compagnie et aussi chercheuse à l’Université du Sussex. Elle a obtenu un PhD en étudiant les résidus des antiparasitaires pour animaux de compagnie dans l’environnement. Elle est l’auteure de nombreuses publications à ce sujet, en particulier sur le rôle des égouts et des aires de baignade dans la pollution des cours d’eau par les antiparasitaires pour animaux de compagnie. Elle est membre des groupes de travail Producing Rational Evidence for Parasiticide Prescription (PREPP) du Collège impérial, ainsi que de Pet Parasiticides de VetSustain.

Fergus Allerton

Fergus Allerton

BSc, BVSc, CertSAM, Dip. ECVIM-CA, MRCVS, Willows Veterinary Centre & Referral Service, Solihull, Royaume-Uni

Royaume-Uni

Le Dr Allerton est diplômé de l’Université de Bristol depuis 2004 et, après avoir exercé six ans en clientèle pour animaux de compagnie, il a effectué un résidanat en médecine interne à l’Université de Liège, en Belgique. Il travaille actuellement dans une des plus importantes structures britanniques de cas référés, tout en étant membre du comité thérapeutique de la WSAVA. Il s’implique activement dans le domaine de la pharmacie vétérinaire via le réseau European Network for Optimization of Veterinary Antimicrobial Treatment (ENOVAT) et a participé à la rédaction des dernières recommandations sur les antibiotiques (PROTECT ME).

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